Quand j'étais étudiant à l'UQAM, c'était le tout début du GIEC et on se posait cette question : "Les scientifiques doivent-ils intervenir politiquement ou rester neutres dans tout débat politique ?" Traditionnellement, les scientifiques ne s'occupaient pas de politique. Ils étaient chargés d'établir les faits, de proposer une compréhension du monde et des phénomènes naturels qui permette de faire des prévisions qui se vérifient si les variables en jeu (la quantité de CO2 par exemple) devaient changer. L'idée, c'était que la connaissance serait disponible pour des gouvernements bienveillants. C'était aussi de maintenir l'indépendance autant que possible entre la politique et les sciences. Cependant, les gouvernements ne sont pas des parents bienveillants qui s'assurent que leurs enfants vivent et grandissent dans un environnement sain. Pour qu'ils s'occupent d'environnement, il faut que la population fasse pression. Or, quoi de mieux que les médias pour sensibiliser la population aux problèmes environnementaux ? Mais comment sensibiliser les médias, si ce n'est pas par un organe officiel rattaché à l'ONU ? Et comment sensibiliser les gens sans leur faire peur, dans ce monde de consommation où la plupart des gens travaillent d'arrache pied pour accéder au bonheur vanté par les médias de posséder cette voiture dernier cri, ce cellulaire indispensable ou cette crème anti-âge ? Alors, voilà nos valeureux scientifiques associés à l'intérieur d'un organe politique dont le but est d'alarmer la population sur les dangers de la pollution. Soyons honnêtes : pour que la population veuille changer et faire pression sur les gouvernements, il est nécessaire de lui faire peur. Cela, nous le savions à l'époque. Mais qu'est-ce qui nous retenait alors ? N'y avait-il pas urgence d'agir ? Aujourd'hui, nous nous trouvons dans la situation où les gouvernements sont endettés par des dépenses effrénées et un lobby de gens très influents visant à réduire l'impôt des plus riches. En conséquence, la recherche scientifique indépendante est presque inexistante. La plupart des efforts de recherche publics sont déterminés par les orientations politiques des gouvernements. Et ces orientations sont le résultat des pressions de l'ONU, de la population et de la presse. Par l'intermédiaire des médias, les chercheurs alertent les gouvernements, qui en réponse leur attribuent plus de fonds de recherche. Et c'est ainsi que la roue tourne. Alors, s'il y avait un train à prendre qui allait assurer que les chercheurs ne soient pas en conflit d'intérêt, nous l'avons manqué. Et lorsqu'il y a de conflit d'intérêt, la science ne reste pas longtemps objective, malgré les meilleures volontés. Mais le système est ainsi fait et ce n'est pas la faute des scientifiques. Le climat n'est pas le seul problème environnemental préoccupant. Mais il est LE cheval de bataille que des scientifiques et des activistes en mal de moyens d'action pour changer le cours de l'histoire ont choisi. C'est par lui qu'il a été décidé de sensibiliser la population sur le fait que la planète est trop petite pour supporter un système économique basé sur une croissance pratiquement ininterrompue et déconnecté des réalités environnementales. Autrefois, j'étais 100% convaincu que c'était le bon cheval, mais aujourd'hui je pense qu'on s'est trompé et que la vérité nous rattrapera tôt ou tard. Je ne suis pas de ceux qui croient que la fin justifie les moyens. Quant aux moyens mis de l'avant pour faire avancer cet agenda, on pourrait en discuter longuement...